Droit de la famille: le divorce des couples mixtes au Maroc

Le mariage mixte est l’union de deux personnes de nationalités différentes. Il devient souvent un sujet complexe surtout en cas de divorce. Les époux se posent souvent plusieurs questions :

  1. Quels sont les types de divorce au Maroc ?
  2. Quel juge est compétent pour prononcer le divorce lorsque les époux ont des nationalités différentes ?
  3. Quelle loi s'applique à leur divorce? La loi de leur propre pays ou la loi marocaine?

Cet article vise à répondre à ces questions et à offrir un aperçu simplifié du droit marocain et de droit international privé.

Les types de divorce au Maroc

La moudawana, le Code de la Famille marocain, envisage deux principales formes de divorce : le divorce sous contrôle judiciaire et le divorce judiciaire.

Le divorce sous contrôle judiciaire

Le divorce sous contrôle judiciaire, également désigné comme le divorce par déclaration, comprend lui-même plusieurs catégories :

A. Le divorce par consentement mutuel: Les deux époux peuvent décider d'une séparation à l'amiable et soumettre au tribunal un document décrivant les termes de leur accord. Après vérification que ces termes ne contreviennent pas à la loi ni ne portent préjudice aux intérêts des enfants, le tribunal autorise la rédaction de l'acte de divorce par les adouls (notaires de droit islamique) puis rend un jugement fixant les effets de la rupture.

B. Le divorce à l’initiative de l’un des époux : Les deux époux peuvent entamer cette procédure pour mettre fin au mariage. Le demandeur doit solliciter l'autorisation du tribunal pour établir l'acte de divorce par deux adouls dans le ressort du tribunal compétent, déterminé par le lieu du domicile conjugal, du domicile du défendeur ou de sa résidence. Si ces lieux ne peuvent être déterminés, le lieu de célébration du mariage est pris en considération. Pour les Marocains résidant à l'étranger, des adouls sous l'autorité d'un juge à l'ambassade ou au consulat du Maroc dans le pays de résidence peuvent rédiger ces actes. Le tribunal convoque ensuite les époux pour tenter une conciliation, avec une obligation de comparution personnelle. En présence d'enfants, deux tentatives de conciliation doivent être entreprises, avec un intervalle d'au moins 30 jours. Si le divorce est demandé par le mari et que la conciliation échoue, le tribunal fixe les droits dus à l'épouse et aux enfants. Si le divorce est demandé par l'épouse et que cette option lui est réservée, l'autorisation de divorcer est accordée sans consignation préalable. Le tribunal enregistre la déclaration de divorce après que les adouls aient rédigé l'acte, précisant dans sa décision les droits de l’épouse.

C. Le divorce avec compensation (khol) : Cette procédure permet à l'épouse de demander le divorce en versant une compensation à son époux. Le consentement de l'épouse majeure à la compensation suffit, mais pour une épouse mineure, le consentement de son représentant légal est requis. En l'absence de spécification sur la nature ou le montant de la compensation, le tribunal est chargé de la déterminer en prenant en compte la situation financière de l’épouse.

Le divorce judiciaire

Le divorce judiciaire peut prendre aussi plusieurs formes :

A. Le divorce pour raison de discorde (chiqaq) : en cas de grave mésentente entre les conjoints, l'un ou les deux peuvent saisir le tribunal pour régler leur différend. Après tentative de conciliation, si aucune résolution n'est trouvée, le tribunal est tenu de prononcer le divorce et de déterminer les droits de l'épouse, en tenant compte de la responsabilité de chaque conjoint dans la rupture du mariage. La procédure doit être clôturée dans les six mois.

B. Le divorce pour manquement par le mari à une obligation du mariage : tout manquement du mari à une obligation stipulée dans l'acte de mariage est considéré comme un préjudice justifiant une procédure de divorce judiciaire.

Cette catégorie inclut :

  • Le divorce pour défaut d’entretien : l'épouse peut demander le divorce judiciaire pour manquement de l'époux à l'obligation de la pension alimentaire. Le tribunal décide du moyen d'exécution de ce prélèvement et ne donne pas suite à la demande de divorce judiciaire en cas de biens disponibles. Si l'époux est indigent, un délai ne dépassant pas trente jours est imparti pour assurer l'entretien de l'épouse, faute de quoi le divorce judiciaire est prononcé.
  • Le divorce pour préjudice subi : survient lorsqu'un comportement déshonorant ou contraire aux normes sociales et morales met l'épouse dans l'impossibilité de continuer à vivre en couple. Les violences conjugales ou les insultes répétées en sont des exemples.
  • Le divorce pour cause d’absence : si l'époux s'absente du foyer conjugal durant une période excédant une année, l'épouse peut demander le divorce judiciaire. Le tribunal vérifie cette absence, sa durée et le lieu de l’absent.

C. Le divorce pour vice rédhibitoire : l’existence d’un vice rédhibitoire compromettant la vie conjugale permet à l'autre conjoint de demander un divorce judiciaire. Par exemple, des anomalies physiques ou des maladies graves pouvant mettre en danger la santé de l'autre conjoint. La demande de divorce n’est valable que si le demandeur n’avait pas connaissance du vice au moment du mariage ou s'il n'avait pas consenti à continuer la vie conjugale malgré sa connaissance de l'irréversibilité du vice. Une expertise est souvent nécessaire pour évaluer la validité de cette demande.

Le juge compétent

En principe, c’est le juge de l'État sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun, ou avaient leur dernier domicile commun s’ils sont séparés. Un couple mixte vivant au Maroc doit s’adresser au juge marocain, même si l’un des époux est revenu dans son Pays. Si le divorce est demandé par celui qui est resté au Maroc, l'Article 27 du Code de procédure civile dispose que « si le défendeur n’a ni domicile ni résidence connue au Maroc, il pourra être traduit devant le tribunal du domicile ou de la résidence du demandeur ».

Si les deux époux ont la même nationalité de l’un des deux États, les tribunaux de cet État sont également compétents, quel que soit le domicile commun. Par exemple, deux Français domiciliés, ou ayant eu leur domicile commun au Maroc peuvent s’adresser soit au juge marocain soit au juge français.

Si une action est déjà engagée dans l’un des pays et qu’un tribunal de l’autre pays est saisi, le dernier saisi doit surseoir à statuer.

La Convention franco-marocaine du 10 août 1981 traite des affaires familiales transnationales entre la France et le Maroc. Voici les principaux points:

  1. Loi applicable : La loi de l'État où les époux avaient leur dernier domicile commun s’applique (Arti. 9 de la Convention). Si les époux ont tous deux la nationalité d’un des États, la loi de cet État est applicable.
  2. Compétence juridictionnelle : Les tribunaux de l'État du dernier domicile commun ou de la nationalité des époux sont compétents. De plus, les tribunaux de l'État dont les époux ont tous deux la nationalité peuvent également être compétents, indépendamment de leur lieu de résidence.
  3. Reconnaissance et exécution des décisions judiciaires: Les décisions de justice rendues dans un pays sont reconnues et exécutées dans l'autre, sauf si elles sont contraires à l'ordre public national ou aux principes de droit public dans ce Pays.
  4. Protection des enfants : la convention protège les droits des enfants dans les divorces mixtes, concernant la garde, le droit de visite et les obligations alimentaires​. Cela permet de s'assurer que les intérêts des enfants sont pris en compte et protégés, peu importe le pays où se déroule le divorce​.

La loi applicable

La loi applicable est la loi nationale commune pour les deux époux qui ont la même nationalité. Si les époux ont une nationalité différente, c’est la loi du pays dans lequel le divorce est engagé qui s’applique. Ainsi, par exemple, un juge marocain saisi d’une demande de divorce entre deux époux italiens doit impérativement appliquer la loi française, tout comme les juges français adaptent la loi marocaine aux époux marocains vivant en France.

Le droit international privé en contexte familial est une branche du droit qui vise à résoudre les conflits de lois et de juridictions qui surviennent dans les relations familiales impliquant plusieurs pays. Ces situations peuvent inclure des époux de nationalités différentes, des couples résidant dans des États différents, ou des familles liées par des lois étrangères. Le droit international privé s'applique pour déterminer quelle loi est applicable et dans quel pays un recours peut être intenté.

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Elia Lo Piccolo
Trainee Lawyer